Aldo Clementi: Momento
CQB 1615_NUM FR // « Depuis plusieurs années, je reste convaincu que la musique (et l’art en général) doit simplement assumer l’humble tâche d’exprimer sa propre fin, ou en tous les cas son extinction progressive », écrivait en 1973 le com- positeur italien Aldo Clementi (1925-2011). Trois ans plus tôt, il avait composé une œuvre charnière : B.A.C.H. pour piano. Selon David Osmond-Smith, c’est à partir de ce moment qu’il utilisa pour toutes ses pièces des « fragments tonaux arrangés en un contrepoint canonique polytonal produisant un état presque continuel de saturation chromatique ». Les tentatives pour décrire sa musique se transforment souvent en une analyse technique ou en un portrait quelconque du principe de décomposition. En général, ses œuvres empruntent un seul chemin : celui du déclin; et pendant que se répète constamment le matériau musical, tempo et dynamisme vont en diminuant. Joueur typique du jeu des perles de verre, Clementi parlait souvent de ses œuvres comme de simples exercices contrapuntiques. Quand seules les cordes donnent à entendre la texture polyphonique, les couleurs sont réduites à des tons de gris aux nuances subtiles qui changent à chaque répétition. La musique se dévoile alors sobrement dans toute sa beauté kaléidoscopique. — Björn Nilsson EN // “It has been my conviction for a number of years that Music (and Art in general) must simply assume the humble task of describing its own end, or at any rate its gradual extinction,” wrote Italian maestro Aldo Clementi (1925–2011) in 1973. Three years earlier he had written B.A.C.H., a piano piece which proved to be pivotal. From this point on, almost all his works are — in David Osmond-Smith’s words — constructed from “tonal fragments arranged in a polytonal canonic counterpoint that ensures near- continuous chromatic saturation.” Attempts to capture Clementi’s music in words have frequently resulted in either technical analysis or in various descriptions of decay. In essence, the only development in a particular work often is its gradual extinction; musical material is repeated incessantly, while tempo and dynamic level constantly ebb away. Clementi, a typical Glass Bead Game player, often spoke of his music as mere contrapuntal exercises, and when the polyphonic fabric is brought to sound with strings alone, the colours are reduced to a monochromatic greyscale in finely- tuned nuances, changing with each repetition. The material is simply displayed in all its kaleidoscopic beauty. — Björn Nilsson